Terre d’espérance, un festival de diversité – Volet 1

Le 4 mai dernier, l’Église protestante unie de la région parisienne a organisé un festival familial « Pour l’avenir des humains et de la planète ». Deux participants de notre région racontent.

Festival Terre d’Espérance à Boissy-Saint-Léger le 4 mai 2024 © DR

 

 Par Marie-Lise et Marc Laurent, Église protestante unie – région Ouest

 

Sur l’invitation de Jean-Luc Crémer, président du Conseil régional de la région Ouest, et pour Église verte-région ouest, nous nous rendons à cette journée « Espérer pour le vivant ».

 

Nous voici arrivés avec le RER A à Boissy-Saint-Léger dans le Val-de-Marne, en banlieue parisienne, avec ses immeubles, sa circulation, le bruit et beaucoup de béton.

Après quinze minutes de marche, changement de décor : dominant la ville, nous sommes dans le parc du temple, avec un bois, une prairie et un collège protestant.

 

Le programme de cette manifestation est dense, varié, multiforme, festif et pour tout âge. Église verte est bien présente et le national tient un stand dans le village éphémère.

Le fil rouge de la journée (10h-21h) est sur le thème des enjeux de la transition écologique, de la justice sociale, de la foi, et comment faire pour sensibiliser et mobiliser chacun sur l’avenir des humains et de la planète. Vaste programme !!!!

 

Impossible de suivre toutes les propositions et invitations qui sont organisées.

Conférences, films, débats, animations, différentes fresques -sur le climat et les frontières-, des ateliers chants, bibliques, sur la nature, des temps de prières sont proposés. Trois expositions dont celle Église Verte, la visite du village éphémère du parc, avec sa place de l’arc-en-ciel et son allée du figuier où se retrouvent des stands comme « désinvestir les énergies fossiles », animé par Lutte & Contemplation avec des intervenants qui agissent pour le vivant. Des jeux de kermesse avec les scouts, spectacle Écolo swing… et tant d’autres choses encore aussi intéressantes, collectives ou individuelles, riches en rencontres, découvertes et réflexions.

La nourriture physique n’a pas été oubliée avec des stands tenus par les scouts ou par des commerçants respectueux des produits locaux qu’ils cuisinent et proposent dans des récipients non jetables. Côté nécessités physiologiques, des toilettes sèches sont installées.

 

Nous avons dû faire des choix. Quelquefois, nous étions ensemble, pour d’autres temps du programme, séparés. Nous avons aussi pris des notes et nous avons choisi de vous partager des temps qui nous ont marqués.

 

Convertir nos pratiques et nos regards

 

Une conférence avec deux intervenants : Christian Huyghe, directeur scientifique agriculture à l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), agronome et docteur en génétique, et Martin Kopp, théologien protestant membre du conseil de la Fédération protestante de France (écologie et justice climatique).

 

Christian Huyghe a commencé par développer son propos en associant conversion et futur désirable, et donc futur à envisager et à partager avec tous. Pour lui la notion de prendre soin fait partie prenante du futur de l’humanité. Pour cela et je le cite «Nous devons renouer avec le vivant dans une attitude de co-écoute. Ceci sous-entend que ni le côté scientifique, ni le côté de la spiritualité ne doivent être oubliés. Pour arriver à convertir nos pratiques, nos regards, il faut agir de manière pédagogique sans trop de pression malgré certaines urgences».

 

Martin Kopp a réagi et a posé la question des « nous ». Il a voulu détailler le « nous » qui concerne l’ensemble des responsables et des responsabilités que nous avons à tous les niveaux. Elles sont à la fois communes et très différenciées. Il a souligné que selon le lieu de vie sur terre, que l’on soit dans un pays riche ou pauvre, qu’on soit homme ou femme, blanc ou de couleur, les responsabilités ne sont pas les mêmes et n’auront pas les mêmes impacts. Avec ce regard, nous devons donc installer une justice climatique qui s’interroge sur les réalités systémiques de notre monde. Il est nécessaire pour l’avenir de l’humanité de changer notre système dominateur basé sur l’apathie, l’égoïsme, la cupidité.

Pour illustrer cela, il a répété que les pays riches du nord comme la France utilisent trois fois les ressources permettant le renouvellement des ressources de la Terre. Ces pays déversent certains déchets dans les pays pauvres dont l’Afrique noire. De plus en plus de rapports officiels de l’ONU montrent que lors de catastrophes climatiques, les femmes ont un taux de décès supérieurs de plus de 10 % par rapport aux hommes (les femmes sont moins mobiles, elles veillent sur les familles et les enfants).

Il a employé le mot d’éco-colonialisme ou colonialisme écologique qu’il a précisé suite à des questions du public. Pour lui, il s’agit du système économique mondial qui cautionne la prise des ressources par les pays riches et le renvoi après transformation de déchets dans les lieux les plus pauvres alors qu’ils ont le plus faible impact climatique. Tout ceci se basant sur les valeurs monétaires et le capital rendant les échanges inégaux.

 

Avancer malgré un engagement conflictuel

 

Suite à des propos de Christian Huyghe qui a stipulé que nous devions moduler nos pratiques pour éviter les conflits, Martin Kopp a répondu qu’un engagement conflictuel a sa raison d’être et peut permettre même d’avancer si les explications de sa position sont claires avec des fondements solides.

Le conférencier a posé des questions à Christian Huyghe en tant que directeur de recherche de l’INRAE. «Est-ce que vos collaborateurs sont mal à l’aise, voire anxieux par rapport aux enjeux environnementaux ? » Après une réponse positive Martin Kopp a repris : «Est-ce que certains démissionnent?»

« Oui », a répondu Christian Huyghe. « Sont-ils militants, activistes ? ». « Oui, certains le sont mais en tant que responsables, a répondu le directeur, ils ne peuvent pas militer au sein de leur travail car ils pensent que cela pourrait nuire à leur éthique scientifique».

 

Des changements sont à apporter à notre imaginaire collectif pour changer nos regards. Martin Kopp a parlé de son expérience en tant que représentant de la fédération luthérienne mondiale aux COP 20 et 21 en citant un exemple qui représente un certain décalage. Ainsi lors des rapports des COP l’expression «mother earth» a été traduite en français par « terre nourricière » alors que pour lui cela aurait dû être « terre mère » (traduction littérale) et cela change tout dans notre considération vis à vis de la planète.

Les deux intervenants sont tombés d’accord pour dire que ces changements doivent se faire à tous les niveaux : individuels, collectifs, législatifs, institutionnels. Face à tous les signaux d’alarme, il faut agir en créant de nouvelles alliances réelles, afin que chacun ait sa juste part de responsabilité car la notion de solidarité, d’équité est primordiale pour notre vie durable, sociale sur terre (valeurs d’écologie intégrale).

 

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