Les Jeux olympiques, fabrique de rituels

L’enthousiasme médiatique et populaire qui a entouré l’arrivée de la flamme olympique à Marseille le 8 mai dernier souligne une dimension particulièrement visible des Jeux : celle de produire des rituels qui amplifient largement l’aspect sportif de la compétition internationale quadriennale.

Question d'actu

La flamme olympique a été transmise à la France le 26 avril dans le stade panathénaïque d’Athènes en Grèce (photo d’archives) © StockSnap de Pixabay

 

Par Jean Loignon, Église protestante unie de Loire Atlantique

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L’antiquité grecque ne séparait pas compétition sportive et culte religieux et comme les Jeux olympiques étaient liés au paganisme polythéiste, le christianisme triomphant les supprima en 393 de notre ère. Sa méfiance envers le corps tint cette religion éloignée du sport des siècles durant et c’est dans le cadre d’une Antiquité redécouverte et passablement fantasmée que renaîtront en 1896 les Jeux olympiques contemporains sous l’égide de Pierre de Coubertin.

 

Un relais qui date de 1936

 

Aux côtés des anneaux entrelacés, inventés et dessinés par Coubertin, la flamme est le symbole le plus marquant des J.O contemporains. Historiquement, rien ne permet de penser qu’une cérémonie d’allumage d’une flamme ait pu inaugurer les jeux antiques. Oui, il y avait des feux permanents dans les temples à une époque sans allumettes ou briquet, et les Grecs honoraient les figures divines, telles que Prométhée, dispensateur mythique du feu à l’humanité. En fait, l’embrasement de la flamme olympique remonte aux Jeux d’Amsterdam de 1928 et le choix d’un allumage par les rayons du soleil dans le sanctuaire d’Olympie résulte de l’intense activité archéologique de l’Allemagne sur ce site grec. Le nazisme développait une vision de l’histoire selon laquelle la « race aryenne » était issue de la Grèce dorienne et de la société viriliste de Sparte. Et quand Berlin en 1936 obtint d’organiser les Jeux olympiques, le ministre Joseph Goebbels en saisit pleinement le potentiel de propagande pour le IIIe Reich. C’est lui qui imagina un relais de la flamme olympique à travers toute l’Allemagne, dans le prolongement des sinistres manifestations aux flambeaux chères aux militants nazis.

 

Un rituel qui peut rassembler

 

On ne peut qu’être surpris qu’un tel parrainage n’ait pas discrédité à jamais le relais de la flamme olympique à la reprise des Jeux en 1948. C’était sans compter l’extraordinaire plasticité du symbole du feu, qui brûle et purifie dans la violence mais qui réchauffe et éclaire l’humanité depuis toujours. Ainsi, le rituel de la flamme des J.O de Paris peut être lu comme ce qui glorifie le patrimoine – d’où le Belem – et rassemble un peuple dont l’immense majorité ne peut accéder aux compétitions, si ce n’est par le biais des écrans. Faire porter la flamme aux quatre coins de la France métropolitaine et ultramarine par des célébrités ou de simples anonymes apparaît comme une compensation éphémère mais démocratique à des Jeux élitistes, largement guidés par des impératifs financiers et économiques.

 

Dans un monde déchiré par les guerres et divisé par les inégalités, se sentir reliés les uns aux autres dans un idéal de fraternité est un effet positif de la « religion olympique » avec toutes ses ambiguïtés. Pourquoi pas, si nous restons lucides devant cette parenthèse enchantée…

 

Dans notre région, la flamme olympique est passée à Poitiers le 25 mai,  Châteauroux le 27 mai, Niort le 2 juin, aux Sables-d’Olonne le 4 et à La Baule-Escoublac le 5. Elle sera à Vannes le 6 et à Brest le 7 juin.

 

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