Luc Œchsner de Coninck et Karine Lusseau sont aumôniers au centre de détention de Nantes, ils nous livrent ici un témoignage sur leur engagement.
Espérer, écouter et résister
La première fois que je suis entré en centre de Détention seul pour visiter un ou plusieurs détenus dans leur cellule, une appréhension certaine m’a envahi, comment vais-je être reçu ?
C’était bien, et en sortant de la première visite j’ai été abordé par un détenu qui venait d’arriver et qui avait besoin de parler et de se confier à une personne neutre, ce détenu a été l’une des rares personnes qui m’a appris les raisons de son enfermement sans que je lui demande. Lentement mais sûrement, j’ai appris à maîtriser cette appréhension.
Heureusement il y avait eu un rassemblement national des aumôniers de prisons le mois précédent, et le thème était : « Choisir la vie : espérer, écouter, résister ».
Espérer et écouter est une attitude qui m’est naturelle même si je ne suis jamais certain d’avoir apporté un minimum de présence, peut-être pas amicale mais au moins exempte de tout préjugé.
Résister me semble parfois plus délicat car chez certains détenus on sent le désir de plaire à tout prix en particulier quand ils vous demandent de « menus services ».
Cet engagement est une forme d’évangélisation prenante, mais elle donne aussi beaucoup de joie.
Luc Œchsner de Coninck
L’attention à l’homme blessé
Dans le livre « L’homme qui marche », Christian Bobin écrit : « La porte de l’humain c’est le visage. Celui dont je n’accueille plus le visage -et pour l’accueillir, il faut que je lave mon propre visage de toute matière de puissance- celui-là, je le vide de son humanité et je m’en vide moi-même. »
C’est à la rencontre de ces visages cachés derrière les murs du centre de détention que je viens depuis plus de vingt-et-un ans. Après ce temps d’engagement fidèle j’éprouve le besoin de souffler un peu. Pourtant, cela peut paraître curieux, la décision d’arrêter est difficile. Car au fil des ans, j’ai reçu en formation humaine et spirituelle autant que j’ai donné.
Ce qui est vécu dans les rencontres c’est l’attention à l’homme blessé. Une parole, un geste, un regard lui permettent de repartir, d’espérer contre toute espérance. Des vies sont déchirées à jamais laissant des plaies béantes et douloureuses mais j’ai été aussi témoin de belles résurrections.
Dans leurs vies déchirées, on apporte fil et aiguille-une Bible et notre présence dépouillée de tout jugement-pour qu’ils puissent se recoudre, qu’ils retrouvent cette capacité à prendre leur vie en main et qu’ils ne détruisent plus celle des autres. Là où on peut retisser une histoire blessée, alors un chemin peut se créer. C’est un combat. Ce n’est pas gagné d’avance.
Par notre présence régulière et répétée, notre attention à l’autre, nous disons ainsi la fidélité de Dieu et son amour.
Karine Lusseau
→ Si vous êtes intéressé par cette mission importante et attachante prenez contact avec Luc Œchsner de Coninck : loechsner@gmail.com ou 06 31 57 10 59.