Par Christophe Cousinié, pasteur dans l’Ensemble des vallées cévenoles
Le premier abord est surprenant pour un Français. Au-delà des contacts avec les autres étudiants, la culture québécoise s’impose d’emblée par son pragmatisme. Ici, tout est direct, du simple bonjour à la thèse théologique ; la réalité ne se cache pas derrière des principes. Connaître un salaire ou délaisser un instant son sac relève d’une confiance normale, comme celle des nombreux étudiants surendettés qui pourtant pensent bien qu’ils trouveront un emploi sans souci.
Si la société de Québec a misé sur la confiance, c’est aussi qu’elle est francophone en pays anglicisant, de tradition catholique dans un pays protestant, donc très minoritaire et habituée à lutter pour son existence. Le clergé protestant qui s’est constitué dans cette province déchristianisée est souvent d’origine catholique converti, ce qui explique qu’il y ait moins de traditions à défendre que de causes à soutenir.
Le pragmatisme et la prise en compte des faits de société s’inscrivent donc jusque dans la pensée religieuse, en Église ou dans l’université. La partie francophone de l’Église unie est dès lors très engagée, par exemple sur le mariage pour tous, depuis des décennies, ou pour l’égalité hommes-femmes. Au seuil des années 2000, le travail s’engageait sur la justice restaurative, au concept prometteur. Les rapports avec les populations autochtones ou premières s’imposaient de manière récurrente tout comme la question des nouveaux ministères ou la pédagogie en catéchèse. Non pas que les Églises québécoises soient en avance sur l’Ancien continent, mais elles semblent ne craindre ni la peur ni les freins. Peut-être ce manque d’attache aux traditions contient-il un risque futur de perdre la spécificité de l’Évangile, mais la découverte pour l’étudiant était un temps fondateur dans un ministère naissant.