Par Corinne Vaillant-Lanotte, présidente de l’Association œcuménique sans frontière
Lorsqu’on arrive dans les Cévennes, on est saisi par la beauté âpre des paysages et la mémoire intergénérationnelle traumatique des dragonnades survenues au décours de la Révocation de l’Édit de Nantes.
Une terre d’accueil, de lumière et de foi
Les villages blottis à flanc de montagne et l’habitat dispersé, « les écarts » comme on dit, rappellent les refuges offerts par la montagne aux différentes périodes de l’Histoire, qu’il s’agisse des assemblées où l’on se rassemblait pour lire la Parole de Dieu et chanter les psaumes, du maquis de la résistance ou de l’hébergement secret par des Justes, de familles juives.
Mais c’est justement une terre d’accueil, de lumière et de foi. Des pasteurs se sont levés pour faire reconnaitre au XVIIIe siècle un protestantisme s’appuyant sur la Bible et non sur un prophétisme peu audible. Des familles protestantes, catholiques et des religieuses ont œuvré pour le bien commun au XIXe siècle. Et au XXe siècle sont apparus les pionniers de l’œcuménisme, qui continue à vivre ardemment au présent.
Des liens fraternels
Les villageois de Vialas ont ouvert leurs maisons, leurs temples et leur cœur. Lors des visites locales, y compris au musée du Désert, l’histoire a été relue et dépassée ensemble.
Le groupe de Bourges était aussi sur les pas de Pierre Layre, personnage bien connu des Augsbourgeois sous le nom de Peter Layre pour y avoir offert la belle grille en ferronnerie d’art de la Barfüsserkirche, site protestant le plus ancien de la ville.
À l’occasion d’échanges œcuméniques avec Augsbourg, les Berruyers ont retrouvé ses origines françaises dans les Cévennes et plus particulièrement à Vialas. Une conférence a dévoilé aux habitants de village le parcours de vie extraordinaire de ce réfugié protestant du XVIIIe dont la descendance croisa les plus grands destins de l’histoire (Mozart, Marie Antoinette…).
Un groupe de protestants d’Angers est venu se joindre au groupe sur certains jours. Des liens fraternels se sont tissés et une prière pour l’unité des chrétiens a été célébrée ensemble. La communauté orthodoxe était symboliquement représentée par une icône et la musique d’un jeune musicien vivant en Thessalonique. La prédication était assurée par le Pasteur Gill Daudé de l’Église protestante unie de Vialas-Génolhac.
Une démarche d’unité des chrétiens
Le groupe berruyer a été invité à participer à l’Assemblée du Désert. L’invitation dont nous avons bénéficié s’inscrit dans une démarche forte d’unité des chrétiens. Des baptêmes ont eu lieu, et les cantiques qui s’élevaient vers le ciel étaient chantés d’une même voix/ voie : celle de l’expression d’une foi en Christ. Nous avons été invités à « chanter à l’Éternel un cantique nouveau », car chaque génération porte en elle l’expression de sa foi qui reste, elle, éternelle. Comme l’a dit le pasteur Gill Daudé, avec des « frères et sœurs d’autres confessions, nous avons pu vivre ensemble cette fraternité du Christ qui nous fait prier « Notre Père » ensemble ». Il ne s’agit pas d’oublier nos différences, mais de faire avec, de mieux comprendre l’identité de chacun et avoir conscience que l’unité en Christ porte sens en elle-même, dans une unité d’Église diversifiée, réconciliée et sincère. Comme il nous paraît naturel aujourd’hui de partager des études bibliques, de prier et d’agir ensemble. Et aimer son prochain, n’est-ce pas aimer l’autre dans ses différences parce que justement ces différences sont riches de ce qu’on n’imaginait pas ?
« Qu’ils soient un afin que le monde croie que tu m’as envoyé » a dit Jésus (Jean 17.21).