Par Anaïs Bolterre, Paroles protestantes Paris
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Prier et lire la Bible est pour certains visiteurs un passage systématique. Pour d’autres l’occasion se présentera ou non, car la rencontre est avant tout une relation d’amitié et d’écoute.
Chaque visite est différente
Ces attitudes différentes au regard de la foi, de la Bible ou de la prière dépendent peu du cadre dans lequel la visite a lieu. Lorsque dans une paroisse un groupe de visiteurs est actif, il établit une liste des personnes à contacter, avant même de savoir qui pourra se rendre chez elles ou comment se dérouleront les entretiens. Et pour cause : chaque personnalité, chaque situation est différente et le temps passé ensemble n’a pas le même sens ni la même intensité pour tout le monde. La force d’une visite tient beaucoup à la capacité d’accueil mutuel des participants.
Une occasion avant tout d’échanger
Pour des personnes ancrées dans la foi, la piété ou la tradition, Bible et prière font partie d’un quotidien qu’elles attendront du visiteur. Toute latitude est alors laissée pour évoquer tel texte ou partager une prière spontanée. Un visiteur d’hôpital a même récemment témoigné de sa perplexité devant un patient en fin de vie souhaitant une prière. Après quelques minutes de partage, l’ensemble se terminant assez spontanément par un Notre Père, le malade avait entrouvert les lèvres pour lâcher un « encore », qui donnait à voir combien il attendait de ce moment.
Mais pour la plupart des personnes, paroissiennes ou non, la visite est avant tout une occasion d’échanger. Il s’établit alors une forme de conversation confiante où les sujets ne concernent pas forcément la spiritualité et peuvent évoquer la famille, le monde, la santé.
Au-delà de la pudeur
Mais à travers chaque discussion, aussi anodine qu’elle paraisse, se dit une personnalité. La façon d’aborder une question, la récurrence des thèmes ou le ton employé sont des indicateurs-clés d’une vie spirituelle qui ne se dit pas, ou pas encore.
Confronté à une conversation de salon, le visiteur n’aura pas forcément l’occasion d’approfondir ou de laisser la personne exprimer des joies, des questions ou des frustrations. Ce type de conversation est même parfois une défense pour ne pas trop se livrer. Cela est spécialement marqué lorsqu’ayant annoncé son départ, le visiteur est retenu au seuil de la pièce par une phrase jaillie dans son dos, d’une profondeur et d’une intensité toutes différentes. S’ensuit une seconde partie de visite, le dos appuyé au chambranle de la porte, où se dit parfois l’essentiel d’une vie.
Une respiration silencieuse
Prier dans de telles conditions n’est pas forcément naturel ni facile. Si cela ne peut se faire par la parole directe, il est en revanche possible de prier intérieurement tout en étant en situation d’écoute. Car l’écoute n’est pas uniquement celle des mots jaillis d’une conversation. Les attitudes, les sous-entendus, les regards indiquent, bien au-delà des mots, ce qui touche à l’humanité et à la spiritualité d’une personne.
Une autre dimension est donc convoquée au cœur de la discussion. Elle ne consiste pas en une prise de distance avec ce qui est dit, mais en une respiration à double sens. Dans le mouvement d’inspiration il s’agit de redonner à Dieu ce qui est partagé, alors que dans le temps d’expiration peut être donné à la personne visitée le regard de la tendresse, de la confiance ou de la compassion suivant l’intuition qu’on en a. Car l’intuition, dans le cadre d’une rencontre, est un des acteurs de la spiritualité et peut donc être considérée par nombre de visiteurs comme un message de l’ordre du divin. Dans cette respiration peuvent se dire en même temps la prière et l’écoute.