Par Corinne Danielian-Verdin pasteure de l’Église protestante unie de Saintes-Cœur de Saintonge
……..
Quand Jésus-lui-même est confronté à la mort, celle de son ami Lazare, en Jean 11.25-26, Il répond à la douleur de Marthe avec ses mots : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand bien même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela? ».
Partir du lien d’amour
Dans le temps du deuil, cette question du Christ : « Crois-tu cela ? » se pose à chacun de nous personnellement, de façon vitale et radicale. Elle nous ouvre un chemin qu’aucun des ponts que nous serions tentés de construire entre le monde du vivant et celui de la mort ne peut construire. Dans le mythe d’Orphée, celui-ci va se perdre en cherchant son aimée Eurydice dans les abysses de la mort, il plonge et brave les enfers pour essayer de la retrouver. Ne cherchons pas les morts dans nos ténèbres, ne laissons pas le deuil nous conduire dans ces abîmes-là. Jésus lui, nous offre une porte, un chemin qui nous conduit vers la vie, la vie en Dieu.
Les liens d’amour que nous avons tissé avec les êtres que nous avons aimés, demeurent vivants.
Parce que nous sommes des êtres de chair et de sentiments, à l’instar de Marthe, nos émotions viennent légitimement exprimer la douleur, la déchirure, l’impuissance, la solitude, le désespoir et parfois aussi la colère. Le soutien des amis, des proches, d’un pasteur peut être vital dans ce temps de deuil, de cette traversée sombre et chaotique, où tout horizon semble disparaître.
Accueillir les souvenirs
Dans l’accompagnement pastoral du deuil, l’essentiel du travail se fait avant la célébration. Il réside, dans la prise en compte de la personne telle qu’elle est, dans le lien que l’on va pouvoir établir avec elle. L’accompagnement commence avant même le premier rendez-vous, par téléphone, SMS, petits mails. Si l’on veut apporter quelque chose aux vivants, il est nécessaire de les écouter parler de la personne décédée. Le lien d’amour qui unit le vivant avec la personne disparue va se cristalliser sur une chanson, une musique, un texte, une photo, un objet, une anecdote. Accueillons ces souvenirs comme le soutien nécessaire de celles et ceux qu’on aide à cheminer, à ne pas être dans le déni. Ce lien est une relation vivante si l’on parvient à se tourner en confiance vers Dieu.
La célébration sert aussi à cela : se remettre en mouvement ensemble conduit par cette lumière que seul Dieu peut nous offrir en vérité. Il est le Dieu de la vie, celui qui a vaincu la mort. Tout le soin que l’on apportera à préparer cette célébration, c’est le temps partagé ensemble pour faire en sorte que la personne puisse tenir debout : on nettoie la plaie, on la soigne, on lui donne une canne et on l’aide à marcher. Aucune attention n’est superflue. Car nous ignorons à quel instant la personne endeuillée va déposer ce qui lui pèse au pied de la croix du Ressuscité.
Témoigner de la vie éternelle
Chaque célébration est unique, adaptée à ce que la famille témoigne et désire partager. Elle est aussi un temps offert pour témoigner de notre foi, pour porter cet évangile à ceux qui n’ont pas les mots, ceux qui ne croient pas, ceux qui n’ont jamais cru, ceux qui ont perdu toute confiance en Dieu.
Lorsque nous acceptons d’accueillir en nous cette lumière de vie éternelle, nous sommes appelés à en témoigner, à la partager auprès des personnes endeuillées. Ce ne sont pas nécessairement nos mots dont elles ont le plus besoin mais de notre lumière de vie capable d’éclairer leur chemin. Lorsque qu’il advient que leurs yeux soient aveuglés par tant de larmes, patiemment, nous pouvons venir les essuyer. Dieu nous offre son éternité. Lorsque notre patience rencontre l’altérité, c’est le don d’amour que Dieu nous fait. Le temps de cheminer vers la vie en lui.