Sanseverino n’a jamais caché sa dette envers François Béranger : sa carrière a été lancée en 2001 par l’album Le Tango des gens, qui contenait une seule reprise, « Le Tango de l’ennui », chanson emblématique d’un aîné qui monterait pour la dernière fois sur scène l’année suivante lors d’un concert de son cadet et un an avant de mourir, en octobre 2003, à l’âge de 66 ans.
Depuis cette époque, Sanseverino témoigne du plaisir et de l’utilité de s’asseoir périodiquement avec sa guitare pour interpréter quelques chansons de Béranger. En 2019, il a autoproduit un premier album d’hommage, The Beber Project Vol. 1. Il prolonge ces treize chansons par douze autres, enregistrées en solo.
Le titre Joue pas avec mes nerfs condense bien l’humeur générale des chansons d’un homme volontiers à bout, que même le bonheur peut agacer. Mais il faut que la bile coule dans les veines car les combats ne manquent pas dans « le cimetière des libertés ». Au-delà de la colère classique de son seul tube radiophonique, « Mamadou m’a dit », on ne peut qu’être surpris que les mots de Béranger conviennent si parfaitement à l’époque présente. Et que l’utopie de « La Fête du temps » fasse toujours rêver.
Sans mimétisme, Sanseverino se glisse avec chaleur dans cette matière incroyablement fervente écrite pendant la trentaine d’années prolongeant Mai 68. Un exercice jubilatoire et utile.
Bertrand Dicale