Sous les figues

Un film d’Erige Sehiri, avec Ameni Fdhili, Fide Fdhili, Feten Fdhili. Sortie le 7 décembre, 1h32, drame.

Le film qui m’a plu

Par Roseline Cayla

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J’aime la Méditerranée et tous les pays qui l’entourent. Je ne les connais pas pour y avoir voyagé, mais j’imagine leurs paysages à partir de ceux du sud de la France, et j’imagine les gens qui y vivent ou qui y ont vécu, à partir de romans venus de ces pays, et aussi un peu à partir de textes antiques, à partir d’objets vus dans des musées… et enfin, à partir de films !

 

Sous les figues est un film tunisien. Nous sommes dans un verger de figuiers, dans le nord-ouest de la Tunisie. La réalisatrice Erige Sehiri est l’auteure de plusieurs documentaires. Ce film est sa première fiction. Des femmes, d’âges divers, attendent, dans la fraîcheur de l’aube, la camionnette du patron qui les amène sur le lieu de la cueillette. Des garçons se sont fait embaucher également. Il y a parmi eux le jeune Abdou qui a perdu ses parents dans un accident. Il revient dans la région après cinq ans et retrouve son amie d’enfance Melek qui pense toujours à lui… Le vent bruisse dans les feuillages, les oiseaux chantent. Cet endroit me fait penser au verger du Cantique des cantiques ! Mais la vie en ce lieu s’avère moins idyllique qu’il n’y paraît. Ce sont des acteurs amateurs qui jouent. Leurs dialogues en partie improvisés (j’ai lu un interview de la réalisatrice !) sonnent vrai. Il y est question de flirt mais aussi de harcèlement, de chômage. Fidé prétend être libre. Son foulard mal fixé glisse souvent sur ses longs cheveux au vent ! Elle monte à côté du patron dans la camionnette mais sait à quoi s’en tenir. Samar, quant à elle, accepte la tradition et n’a pas l’intention de retourner au lycée à la rentrée. Elle veut se marier et a jeté son dévolu sur le beau Firas qui semble aussi intéresser Fidé et d’autres. Mais du haut de ses 17 ans, Samar prétend le changer et « il m’obéira » dit-elle ! Fidé lui conseille plutôt de continuer ses études. La naïve Samar déclare à Fidé : « Firas est à moi ! » Le ton monte et Fidé, qui aime jouer avec le désir des jeunes hommes, dit crûment ce qu’elle pense d’eux ! Le bruit attire un vieil ouvrier venu d’une parcelle voisine. Ce n’est pas bien de parler des hommes de cette manière ! Quant à Firas, il n’aime pas la jalousie, que Sana se le tienne pour dit…

 

Au fil des scènes, nous voyons les espoirs, les doutes de chacun. Les regards parlent aussi. Personnages attachants qui aspirent, différemment, à la liberté. Mais tous sont prisonniers de la tradition. Les femmes plus âgées ne parlent guère si ce n’est pour rappeler que le travail n’avance pas… La vieille Leila dit qu’elle ne s’est pas mariée avec celui qu’elle aimait et qu’elle l’aime encore. Elle se met à chanter, ses larmes coulent. Peut-être, hélas, l’une de ces jeunes filles aura encore une vie semblable à la sienne.

J’ai aimé ce film qui dit légèrement des choses graves. Les visages, au milieu des feuilles de figuiers, dans l’entrelacs des branches, sont magnifiquement filmés.

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