Le film qui m’a plu
Par Roseline Cayla
Certains films sont portés aux nues mais ne me plaisent pas, soit parce que je les trouve angoissants, soit parce que je les trouve trop compliqués pour moi et que ne saisis pas tout (!), soit parce que la présentation qui en est faite dans tel ou tel magazine, me laisse attendre un autre film que celui que je vois. Il m’est arrivé aussi, de me demander pourquoi le critique se montre si sévère avec tel ou tel film que j’ai apprécié.
Le Tigre et le Président de Jean-Marc Peyrefitte est de ceux-là. Le film est une comédie et n’a pas la prétention d’être historique. Le Tigre était le surnom de Georges Clémenceau (André Dussolier), surnom donné pour la pugnacité de cet homme politique, sans doute, voire sa férocité dans ses rapports avec ses semblables. Le Président (Jacques Gamblin), c’est Paul Deschanel qui a laissé peu de traces dans l’Histoire. En préambule, le réalisateur annonce que ce que le film raconte est vrai, sauf ce qu’il a dû imaginer pour le rendre compréhensible. Ce qui est vrai, c’est que Paul Deschanel, élu Président de la République en 1920, a été retrouvé un matin en pyjama, errant le long d’une voie ferrée ! À partir de là, le réalisateur imagine une histoire mettant en scène l’entourage de cet homme et de son adversaire le Tigre, pour expliquer ce qui s’est passé, et comment il n’a pu exercer ses fonctions que neuf mois. L’histoire est à la fois triste et cocasse. Elle révèle un Président inattendu pour son époque.
La sympathie du réalisateur pour cet homme apparaît dans le discours qu’il lui fait tenir, autant que dans la façon que se comporte ce personnage lunaire ! C’est un idéaliste, en avance sur son temps, une sorte de prophète qui annonce des temps nouveaux où les hommes et les femmes seront enfin égaux, celles-ci voteront, entre autres (ce qui fait rire tout le monde) et où la fraternité sera effective sur cette terre…
Le titre, bien sûr, fait penser à une fable. Le Président, pieds nus (ainsi marchent les saints !) dans sa galère surréaliste, rencontre un brave homme qui, se déplaçant sur une draisine, inspecte la voie ferrée. Ce dernier l’amène dans sa petite maison d’employé des chemins de fer, où l’accueillent sa femme et sa belle-fille, comme s’il remplaçait le fils de cette famille, mort lors de la Grande Guerre. Scène à la fois invraisemblable et touchante.
D’autres scènes tout aussi invraisemblables, comme le Président et sa femme courant pour récupérer les feuilles de son discours emportées par le vent, nous font aimer cet homme fragile, trop sensible pour la fonction qu’il doit assumer. Innocent qui marche au milieu des loups !
Un film simple, sympathique, émouvant et poétique qui oscille entre réalisme et fantaisie.