Myriam et la libération d’Israël

Le récit de l’Exode est marqué par trois personnes : Moïse, son frère Aaron et leur sœur Myriam…

Par Élisabeth Brinkman
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Myriam, psautier de Chludov, IXe siècle © Domaine public (Wikicommons)

Moins connue que ses frères, Myriam est pourtant une figure fondatrice d’Israël. Ce rôle lui est attribué notamment par le prophète Michée qui la fait figurer dans sa généalogie (Michée 6.4) où sont nommées très peu de femmes par ailleurs, ce qui indique bien à quel point elle a marqué l’histoire de son peuple.

 

Le sauveur sauvé par des femmes

 

En Exode 2 nous est racontée la naissance de Moïse : sur ordre du pharaon, les nouveau-nés mâles doivent être tués ; or la mère de Moïse va essayer de sauver son fils nouveau-né. Elle le couche dans un panier d’osier (le mot hébreu utilisé est le même que celui qui désigne l’arche de Noé, symbole de vie à travers la mort) et le laisse sous la garde de sa sœur dans les eaux du Nil. C’est cette sœur, que la tradition a très vite identifiée comme étant Myriam, qui arrivera à sauver son petit frère. En discutant avec la fille du pharaon qui trouve le berceau, elle va en effet inviter celle-ci à confier le bébé à une nourrice choisie parmi les femmes des Hébreux (nulle autre que sa propre mère), avant de l’adopter comme son propre fils.

 

Une prophétesse parmi les siens

 

Nous connaissons Myriam surtout par son chant à la gloire de YHWH après le passage de la mer rouge (Exode 15.20-21) : « La prophétesse Myriam, sœur d’Aaron, prit en main le tambourin ; toutes les femmes sortirent à sa suite, dansant et jouant du tambourin. Et Myriam leur entonna : « Chantez le SEIGNEUR, il a fait un coup d’éclat. Cheval et cavalier, en mer il les jeta ! » ». Myriam ici est explicitement considérée comme prophétesse, la première à recevoir ce titre dans le Premier Testament, au même titre que son frère Aaron (Exode 7.1). Une fois de plus elle se trouve donc au premier plan du récit, puisqu’avec son frère Moïse elle chante la gloire du Seigneur en dévoilant le sens profond de la sortie d’Égypte (c’est le rôle du prophète, d’interpréter le sens profond d’un événement) : il ne s’agit pas d’une simple fuite devant des conditions de vie difficiles mais bien de l’avènement d’un nouveau monde et d’un nouveau peuple de Dieu. C’est la première Pâque, la première fête de la traversée et du passage de Dieu. Myriam est aussi à totale égalité avec ses frères : elle a entrepris le voyage vers le pays promis munie de son tambour, signe de joie et d’espérance et elle suscite un chœur de femmes qui chantent et dansent avec elle.

 

Une contestataire de l’autorité de son frère

 

Myriam est donc une meneuse qui sait prendre des initiatives et qui suscite joie et espérance. Cette première Pâque, la première fête de la traversée et du passage de Dieu, est le point de départ d’une longue route pour le peuple hébreu. Myriam est une femme consciente que Dieu parle à travers elle comme à travers Moïse. C’est une femme au franc-parler qui prend la parole et ose intervenir avec Aaron pour contester un choix de Moïse (Nombres 12.2) qui vient d’épouser une femme étrangère, une Koushite (Éthiopienne). Leur argument à tous deux c’est qu’ils sont les égaux de Moïse et que le Seigneur parle également à travers leur bouche. Myriam sera sévèrement punie : elle se retrouvera avec la lèpre après cette contestation et devra se purifier pendant sept jours avant de pouvoir réintégrer le camp. Aaron et Moïse vont intervenir tous deux pour elle auprès de Dieu et, ce qui est significatif aussi : son peuple ne veut pas repartir sans elle. Ils ne reprendront leur marche qu’une fois qu’elle aura réintégré le camp. C’est bien cette égalité que souligne Michée (Michée 6.4) : « Car je t’ai fait sortir d’Égypte, je t’ai délivré de l’esclavage et je t’ai envoyé, pour te guider, Moïse, Aaron et Myriam. »

 

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