Loi de séparation des Églises et de l’État, les cotisations en 1906

Jocelyne Cathelineau, membre de l’Église protestante unie de Melle-Celles-Saint-Maixent, s’est plongée dans les archives de son Église. Elle a publié quatre articles dans le journal de son Église, Bonne Nouvelle Jonas. Nous vous livrons le deuxième.

Trésors d’archives – volet 2

 

Par Jocelyne Cathelineau, Église protestante unie de Melle-Celles-Saint-Maixent

 

 

Une liasse de 77 fiches jaunies mais parfaitement lisibles, format 20 sur 15 cm, enserrées entre deux planchettes trouées, maintenues par un fil de fer… voici le « legs » d’une trésorière consciencieuse (Eh oui, en 1906, le trésorier paroissial est… « Madame Bourguignon ») qui nous permet, un siècle plus tard, de nous faire une idée de la situation matérielle des paroissiens de Saint-Maixent et environs, et de la façon dont l’Église entendait leur faire régler leur contribution.

 

Un barème variant selon la situation familiale

 

Un document important manque, évoqué par plusieurs personnes ayant rempli les fiches : la « circulaire » du 10 avril 1906 qui a indiqué aux paroissiens un barème variant selon la situation familiale. Nous devinons que les enfants ayant fait leur confirmation sont comptés comme paroissiens, on suggère seulement que leur contribution soit moindre que celle de leurs parents. À aucun moment, les documents retrouvés ne disent si la cotisation est mensuelle, trimestrielle, annuelle… Elle est en anciens francs bien entendu.

 

Nous nous intéressons ce jour aux plus pauvres de l’Église, ceux qui ne cotisent pas du tout, les « indigents » selon le terme du moment. Seule une petite partie de ces paroissiens pauvres ne sait pas écrire. C’est alors de la main du pasteur ou de la trésorière qu’on lit « indigent, gratuité » à la suite de la liste des personnes composant le foyer.

 

Il y a peu de refus de cotiser. La famille de François B, de Gentray, a une bonne raison de ne pas le faire. « Nous faisons partie de l’association cultuelle de Sainte-Néomaye » répond-elle. Gentray est un « écart » (comme on dit ici) de la commune de Saint-Martin de Saint-Maixent, mais il peut être commode de se rendre au culte à Sainte-Néomaye, le temple de ce village étant distant de quelques kilomètres. Pas de motif précis de refus par contre sur la fiche où un tiers indique « Les demoiselles L… refusent ».

 

Un éclairage sur la misère de certains paroissiens

 

Une des premières à se déclarer indigente, ce qui lui vaut la dispense de cotisation, c’est la propre concierge du temple de Saint-Maixent, dont on sait par ailleurs qu’elle a un revenu annuel de… 60 francs. On espère qu’elle est logée gratuitement !

 

Quelques fiches jettent un éclairage sur la misère de certains. Un couple dispensé de cotiser indique « inscrit au bureau de bienfaisance ». Une main pastorale porte en face de la question « Quelle sera votre cotisation ? » le mot « gratuite » ! La famille D. concernée se compose des parents, de trois petits et d’une grand-mère veuve.

 

Le veuvage implique souvent, dans les familles pauvres ou modestes, que le survivant vive chez ses enfants…

Les meuniers avaient la réputation, quelquefois surfaite, d’être riches… Celui de Pallu, Armand G, fait savoir : « Je suis seul avec mes enfants » et il justifie le fait qu’il ne paiera pas de cotisation pour les « trois jeunes ».

Adèle F, rue Haute de la Croix à Saint-Maixent, explique : « J’ai ma mère qui voudrait bien faire partie de l’association cultuelle mais qui est à la charge de ses enfants et ne peut s’engager à payer. »

Malgré des revenus limités, Auguste R, un père de famille, marié, tient à payer un peu. « Je fais partie de la société philanthropique (comprenons qu’il bénéficie de secours) la cotisation est pour mon enfant. »

 

Dans un prochain article, nous verrons les paroissiens modestes qui s’engagent à payer 1, 2 ou 3 francs… plus cinquante centimes pour leurs enfants déjà admis à la Sainte-Cène.

 

Lire le premier article : Loi de séparation des Églises et de l’État, l’Église compte ses forces.

 

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