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Paul Tillich, « Le courage d’être »
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2. Le courage : une vertu parmi d’autres ?
Par Émile GENOUVRIER, Église Protestante Unie de Touraine.
La question est aussi vieille que la philosophie !
Il est donc logique que Paul Tillich ouvre son livre par un historique qui nous conduit de Platon à Nietzsche en passant par les Stoïciens et Spinoza… Nous n’entrerons pas dans le détail de cette remarquable mais austère synthèse ; nous en retiendrons qu’il n’y a pas sur le courage de propos définitif. Et que les grands philosophes qui se sont penchés sur la question peuvent se répartir en deux courants :
Ceux pour lesquels le courage est une vertu parmi d’autres, comme Platon, Aristote ou Thomas d’Acquin,
Et ceux pour lesquels le courage est la source de toutes les autres vertus. Ce qui est le cas des Stoïciens, de Spinoza et de Nietzsche.
D’un côté une approche éthique du concept ; de l’autre une approche ontologique, c’est-à-dire qui place le courage à la source même de l’être, de la vie.
Paul Tillich se situe explicitement dans ce second courant : le courage est au fondement de l’être.
C’est en effet le courage qui permet à l’être de résister aux forces du non-être, et cela tout au long de la vie.
Car les forces du non-être, ces forces négatives, destructrices, sont d’une redoutable permanence et d’une redoutable vigueur, de la naissance à la mort qui y met un terme dramatique : maladies, pertes, misère, guerre, violences en tout genre, sentiment de rejet, de déclassement, accidents, catastrophes climatiques.
Solitude, sentiment de rater sa vie, expérience du non-sens, de l’absurde… Tant d’expériences négatives qui peuvent conduire au désespoir !
Mais ces forces négatives sont toujours en dialectique avec le dynamisme qui est au fondement de l’être. Car notre être n’est pas une réalité statique ! C’est un dynamisme de vie, une puissance de vie qui se manifeste en triomphant au long des jours du non-être.
Et c’est là que se situe le courage dans sa définition ontologique. Le courage est ce qui permet à l’être de triompher du non-être. Ce n’est pas une vertu parmi d’autres. C’est la vertu. C’est elle qui nous est donnée pour survivre à l’angoisse de la finitude et de l’anéantissement.
On entend bien dans ce propos que le livre de Tillich n’est pas un livre de circonstance ou de consolation. Sa portée est universelle. Devant les divers chaos qu’il nous a été donné de vivre dans la seconde partie du XXème siècle ; et de nouveau dans ce premier quart du XXIème devant la montée des forces « démoniques » de la tyrannie, de l’agression guerrière, du mensonge organisé, de l’exploitation des hommes et de notre planète… Nous avons bien besoin de ce courage que Paul Tillich va nous aider à discerner dans ses diverses manifestations.
Mais nous ferons d’abord place à un préalable : la relation du courage avec l’angoisse. L’être, le non-être et l’angoisse : voilà de quoi nous parlerons la fois prochaine.
Précédemment :
©︎ Éditions Labor & Fides
de Paul Tillich
2014, 123 pages
16€