Parmi les fêtes du calendrier chrétien, il en est une que les protestants n’ont pas en commun avec les catholiques : l’Assomption. Quelle en est donc la signification ?
C’est souvent d’une manière péremptoire que s’exprime le sentiment d’un catholique sur ce sujet délicat, « De toute façon, vous les protestants, vous ne croyez pas dans la Vierge Marie ». Après avoir précisé que si, les protestants croient en l’existence de la mère de Jésus (bien obligés), la discussion se porte assez vite sur les deux dogmes parmi les plus récents proclamés par Rome, l’Immaculée conception et l’Assomption.
Ancienne croyance
Mentionnée déjà par le concile d’Éphèse en 431, la fête du 15 août serait à l’origine la date de la consécration de la première Église dédiée à Marie « mère de Jésus fils de Dieu » à Jérusalem. Dès les tout débuts du christianisme en effet, les apocryphes se multiplient autour de la naissance et la mort, également miraculeuses, de Marie. Les récits se transmettent avec des variations notables mais convergent sur un point : Marie est directement élevée dans la gloire « après avoir achevé le cours de sa vie terrestre » (on ne précise pas si elle est morte avant de monter au ciel ou pas).
En Occident, la fête qui commémore cette histoire prend le nom d’Assomption au VIIIe siècle ; il ne s’agit encore que d’une forte tradition autour de croyances très populaires. Au XIXe siècle, le culte de Marie devient beaucoup plus encadré. En 1854, la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception (qui traite de la conception de Marie elle-même et non de celle du Christ), entraîne de très nombreuses pétitions réclamant que l’Assomption soit élevée au même rang de dogme. Presque un siècle plus tard, en 1950, le pape Pie XII déclare : « Par l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux apôtres Pierre et Paul et par notre propre autorité, nous prononçons, déclarons, et définissons comme un dogme divinement révélé que l’Immaculée mère de Dieu, la Vierge Marie, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire céleste ».
Culte marial
L’Assomption est aujourd’hui dans l’Église catholique une fête d’obligation (un vrai catholique doit se rendre à la messe ce jour-là) et la tradition s’est perpétuée dans de nombreuses villes de France d’en faire un jour particulier, avec des processions mais aussi des cérémonies qui ont souvent perdu une partie de leur caractère religieux (feux d’artifice par exemple). Le 15 août est férié dans le calendrier civil, comme Noël, l’Ascension ou la Toussaint, des fêtes religieuses qui sont fixées selon la date et non forcément un dimanche.
Si l’on regarde le phénomène de façon historique ou anthropologique, il est facile de constater que les églises dédiées à Marie se sont souvent bâties sur d’anciens temples dédiés à des divinités féminines : Isis, Aphrodite, Cybèle, déesse-mère, etc. L’Église a dû composer pendant des siècles avec des croyances païennes pour faciliter les conversions d’abord et éviter de braquer les populations en interdisant leurs coutumes traditionnelles.
Les protestants regardent tout cela de manière plutôt détachée car ils ne se sentent pas vraiment concernés, rien n’étant mentionné dans les Écritures sur la conception de Marie ni sur sa mort. Les réformateurs, au XVIe siècle, ont eu beau jeu de parler de « mariolâtrie » pour qualifier le culte de Marie qui n’a cessé de prendre de l’ampleur au cours des siècles. Ils conservent cependant respect et sympathie pour la figure de la mère du Christ, telle qu’elle est mentionnée dans les Évangiles.
Anne-Marie Balenbois