Les films qui m’ont plu
par Roseline Cayla, Église protestante unie d’Angers Cholet
“L’attachement” de Carine Tardieu, adapté du roman d’Alice Ferney “L’intimité” (2020 Actes Sud)
Une situation mélodramatique
Cécile a perdu les eaux, elle doit se rendre en urgence à la maternité où son mari Alex (Pio Marmaï) va la conduire. Il était prévu que, pendant ce temps, sa voisine Sandra (Valeria Bruni-Tedeschi), célibataire endurcie qui s’occupe d’une librairie féministe garde leur fils Elliott, 6 ans (César Botti), mais elle n’y est pas tout à fait prête. Bref elle va s’occuper de l’enfant qui est très raisonneur et pose maintes questions. Bientôt Alex revient, une petite fille lui est née, Lucile, et nous comprenons tout de suite que l’accouchement s’est mal passé. Comment annoncer au petit garçon, qui décidément comprend tout avant qu’on lui explique, la mort de sa maman ? La situation est d’autant compliquée qu’Alex n’est que le beau-père de l’enfant, dont le père, David (Raphaël Quenard) va se manifester pour prendre son fils en charge . Mais Alex est très attaché au petit garçon.
La confusion des sentiments
Rapidement, Sandra est séduite par ce petit garçon qui trouve en elle une personne qui a gardé un esprit d’enfant. Elle prend à cœur cette garde qu’on lui a confiée. L’enfant s’attache à elle. De son côté, Alex apprécie son aide et sa compagnie. Il se méprend sur les sentiments qu’il croit éprouver pour Sandra. « Tu veux faire ton deuil sur moi, Alex» lui dit-elle en refusant d’avoir une relation sexuelle avec lui. (Son amant du jeudi lui convient très bien, elle ne veut d’aucun engagement !) Alex ne sait plus trop où il en est. Par ailleurs Emilia, la jeune pédiatre de la maternité (Vimala Pons) ne s’embarrasse pas de façons et lui dit son attirance…
La solution
Ce film romanesque nous montre des personnages sympathiques que nous sommes invités à comprendre, avec chacun leurs difficultés ou leurs motivations. Il montre finalement qu’il est illusoire de prétendre être maître de sa vie… Sandra n’est pas tout à fait ce qu’elle disait et croyait être. On peut finalement considérer que l’amour (agapè) a orienté sa vie… et elle ne le savait pas !
“Au pays de nos frères” de Raha Amirfazii et Alireza Ghasem
« Le pays de nos frères » c’est ainsi que les Afghans appellent l’Iran, où des milliers d’entre eux se sont réfugiés après l’intervention américaine en Afghanistan en 2001 . Le film de Raha Amirfazii et Alireza Ghasem nous montre un groupe familial tentant d’y refaire sa vie, et cela ne va pas sans souffrances et humiliations. Nous sommes en hiver, le vent soulève la neige. Nous suivrons de dix ans en dix ans, des personnages, dont deux sont adolescents au départ, Mohammad (Mohammad Hosseini) et Leïla (Hamideh Jafari).
Un lycée technique, un poste de police, une serre
Des garçons dans un atelier devant de machines. Sont-ils iraniens ? sont-ils afghans ? L’un d’eux, Mohammad, apercevant la police se rend compte qu’il a oublié ses papiers. Il dit à un autre, que leur physique ne les désignant pas comme afghans, il espère ne pas être inquiété. Mais il se fait attraper. Conduit au poste de police, il est, comme d’autres, retenu abusivement et on lui enjoint aussitôt de travailler comme manœuvre à la réfection du lieu dégradé par une inondation. Il doit y venir chaque jour après les cours. Comme ses parents ne sont pas en règle ( ils travaillent dans une serre et y habitent semble-t-il) Mohammad n’ose rien dire. Rentrant chez lui plus tard que d’habitude, il dit être resté à l’atelier de menuiserie. Mais il y a la douce Leïla, au joli foulard, une adolescente du groupe ( la famille a fait allusion à son fiancé qui n’a pas donné signe de vie…) Elle s’occupe des tomates dans la serre. Elle apprend l’anglais et Mohammad l’aide dans cet apprentissage. Il est évident qu’ils sont secrètement amoureux l’un de l’autre. Elle devine qu’il y a quelque chose d’anormal dans la vie du jeune garçon. Apprenant que le poste ne doit pas faire travailler une personne infirme, Mohammad s’écrase une main avec un outil et se présente le lendemain au poste, la main bandée. Le chef le regarde bizarrement et l’on flaire tout de suite le pervers. Ce jour-là, après les tâches imposées, « Tu as de la chance d’être mignon » dit l’homme à l’adolescent à qui il intime l’ordre de se changer sous prétexte que celui-ci s’est sali en travaillant. Ils sont seuls tous deux dans la pièce. L’adolescent dit qu’il se changera plus tard… Puis l’on voit, le soir, Mohammad assis dans la neige, le visage tuméfié, il n’ose pas rentrer chez lui. On devine ce qu’il a subi.
Dix ans plus tard, dans une grande demeure…
Leïla et Hossein, le mari qui lui a été imposé, sont les employés clandestins d’une famille aisée qui les exploite. Ils habitent sur le lieu de leur travail avec leur petit garçon. Chacun les sollicite pour ceci ou cela à tout bout de champ. Soirées bien arrosées, feux d’artifice… Ce jour-là Leïla découvre son mari inanimé à côté de boîtes de médicaments. Que s’est-il passé ? Leïla effondrée va s’employer à cacher ce décés à ses patrons, mais comment et jusqu’à quand? Seule elle enterrera Hossein pendant que les autres font la fête sur la plage. Désormais seule avec leur enfant, que vont-ils devenir ?
Dix ans plus tard encore, la nationalité iranienne pour tous…
Les Afghans convoqués dans une grande salle, vont apprendre le texte qu’ils devront dire et signer, le jour de leur naturalisation. Je ne vous en dis pas plus.
Un film pudique, mais qui laisse deviner bien des choses. Des personnages attachants. Des situations poignantes. Le titre du film semble bien ironique au vu de ces drames.