C’est quoi un ministre ?

Au moment où l’Église protestante unie se donne les moyens de réfléchir à sa mission et aux ministères dont elle a besoin, il peut être utile de rappeler les fondamentaux ; car la réalité du ministère est plus complexe qu’elle n’en a l’air.

Par David Steinwell

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Le pasteur, ministre… de la Parole © Eugenio Albrecht

Montant dans un autobus des années 1930, un pasteur avise quelques sièges plus loin le président du Conseil presbytéral. Il soulève son chapeau et lance d’une voix forte « Bonjour M. le président », ce à quoi l’autre répond sur le même ton « Bonjour M. le ministre ». Outre le regard interloqué des passagers, cette scène connue dit beaucoup de la réalité de l’Église.

 

Un serviteur de la Parole

 

Jadis, un pasteur était couramment appelé « M. le ministre », l’expression sous-entendant de la Parole, et non de l’Église. La précision est importante si l’on s’attache à la définition d’un ministre. Dérivé de la racine minus, qui désigne ce qui est en dessous, le terme latin minister évoque le serviteur, l’aide. On peut alors distinguer le secteur de cette aide et d’où vient le mandat de ce service. Par exemple, pour ce qui concerne la France, un ministre est attaché à un secteur d’activité, comme l’économie ou la justice, son mandat lui vient du président de la République par décret sur proposition du Premier ministre, qui le ratifie. Le ministre est ainsi ministre de l’État, appelé à participer à un gouvernement pour un service particulier et nommé à son poste par un accord entre le chef de l’État et celui du gouvernement.

 

Les différents mandats possibles

 

Ce qui se passe dans l’Église est du même type, même si cela doit être transposé. Le ministre est ministre de la Parole, reconnu par l’Église nationale ; sa nomination est le fruit d’un appel local et incombe conjointement au Conseil presbytéral et au Conseil régional, elle est ratifiée par le Conseil national qui en informe le synode. Un pasteur, par exemple, est donc ministre de la Parole exerçant son service dans le cadre d’une paroisse ou d’une œuvre. À proprement parler il n’est pas pasteur d’une paroisse mais pour cette paroisse.

Dès lors, on peut imaginer d’autres types de services et donc de ministères : auprès d’une paroisse, d’une œuvre ou de toute autre mission particulière, comme sont définis par thématiques les ministères français, par exemple de l’Industrie ou du Développement.

 

Une différenciation fonctionnelle

 

Cela explique en partie aussi pourquoi certaines personnes sont appelées pasteurs, lorsqu’ils sont en service paroissial là où d’autres sont ministres lorsqu’ils assument un poste spécialisé. L’histoire de l’Église enseigne qu’il existait naguère la fonction de pasteur, ministre de la Parole, et dans certaines Églises d’autres fonctions de soutien diaconal ou paroissial. Mais le ministère pastoral était premier et cette image a sans doute déprécié l’idée que les fidèles se faisaient des autres missions considérées comme subalternes. Cet écueil culturel n’a pas forcément de raison d’être si l’on considère la fonction de serviteur. Le pasteur de paroisse, qu’il soit reconnu ou ordonné, reste serviteur de la Parole au même titre que d’autres pourraient l’être de la catéchèse, de l’exégèse ou de la diaconie.

Si cette différenciation de fonction était mise au premier plan, cela permettrait d’une part de multiplier les types de ministères en fonction des besoins et d’autre part de constater que, pour la bonne marche de l’Église, il y a parfois besoin d’une hiérarchie de fonction entre les différents ministères ou services dans un lieu précis. Sans parler de hiérarchie, la différenciation fonctionnelle empêche de se focaliser sur le statut des personnes, là où seul compte le service. Appeler « son » pasteur M. le ministre pourrait bien revenir à la mode…

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