Paroles de jeunes

Pour bien commencer la nouvelle année, les rédacteurs de la Presse régionale protestante ont eu envie de donner la parole à des jeunes, et rien qu’à eux.

Issus pour la plupart du protestantisme, ils ont fait le choix de vie, de profession – rémunérés ou bénévoles – , de vrais choix qui ne correspondent pas à ceux de la  » majorité  » de leurs contemporains.
Et s’ils sont plusieurs dans ce dossier à s’être engagés dans l’écologie, ce n’est pas l’effet d’un mot d’ordre des rédacteurs, mais dans doute un signe des temps. Dans notre époque parfois sombre, ces jeunes adultes, impliqués dans la marche du monde, donnent à espérer. Et si nous les écoutions avec plus d’attention ?
Sur ce site du Protestant de l’Ouest, nous avons mis en avant trois jeunes qui, soit vivent dans la région Ouest, soit en sont issus.

Le dossier Paroles de jeunes peut être téléchargé dans son intégralité.


Léonore Moncond’hui © Groupe écologique et citoyen Nouvelle-Aquitaine

Léonore Moncond’hui, maire de Poitiers

Issue du scoutisme, Léonore a été élue maire à 30 ans, sur une liste aux priorités écologiques.

Un jour, chez les Éclaireurs unionistes de France, on m’a dit « Tu es capable, on te fait confiance ». J’avais 11 ans, on me proposait d’être « sizenière », pilote d’équipe. Cette confiance a priori, cette responsabilisation, ce soutien collectif m’ont suivie tout au long de ma vie d’éclaireuse.
Ainsi, lorsqu’on m’a proposé, avec la même confiance, de franchir le pont entre l’associatif et le politique, j’ai osé me lancer. J’ai été élue conseillère régionale en 2015, benjamine de la Nouvelle-Aquitaine. Ce mandat a constitué ma formation politique : déléguée à la vie associative et au volontariat, j’ai appris à connaître l’intérieur d’une institution, à trouver les moyens d’agir, et je suis devenue co-présidente du Groupe écologiste et citoyen.
J’ai constaté combien la politique, les élus, les partis, suscitaient de la défiance de la part des citoyens et notamment des plus jeunes. Et combien, de ce fait, les assemblées étaient peu représentatives de la société. C’est pourquoi je me suis engagée dans un mouvement citoyen : Poitiers Collectif. Nous avions pour objectifs de redonner confiance en la politique, et de permettre à chacun de s’y investir, par une démarche très ouverte, démocratique, transparente, avec des méthodes d’animation issues de l’éducation populaire. Deux ans avant l’élection, nous avons décidé de « reprendre la main » sur l’avenir de la ville… et nous avons réussi ! Aujourd’hui maire de Poitiers, je poursuis l’engagement pour le renouvellement des générations et des pratiques politiques.
Mon engagement, c’est aussi l’écologie : une conviction politique, peut-être née dans la vie, dans la nature, dès l’enfance… Mais c’est aussi une responsabilité générationnelle : notre responsabilité est de permettre à notre génération, à celle de nos enfants, nos petits-enfants, de grandir dans un monde vivable, en nous adaptant aux bouleversements climatiques pour « vivre avec », aussi heureux que possible.
Et je fais confiance à la nouvelle génération de jeunes engagés pour rendre le monde un peu meilleur qu’ils ne l’ont trouvé en arrivant.


Morgane Giffard © DR

Morgane Giffard, ingénieure dans l’éolien

Morgane est aussi catéchète à Nantes et évoque une prise de conscience progressive.

À 29 ans, mes convictions écologiques se sont construites depuis mon enfance, puis au cours de mes études et de mon travail d’ingénieure. Passionnée par la production d’énergie, qui facilite grandement nos vies, j’ai compris que l’enjeu était fortement politisé et que j’aspirais à une énergie locale et renouvelable. J’ai pu rejoindre un constructeur éolien allemand, où j’ai été beaucoup influencée par mes collègues : prendre le vélo, limiter les aliments transformés, avoir un compost (même d’intérieur !), éviter le suremballage, limiter l’avion, etc.
Plus jeune, j’étais déjà dans la sobriété de la consommation ou la réutilisation des papiers cadeaux. Mais sans exemple autour de moi, ni aide reçue, je n’aurais jamais pensé parcourir les 11 km de mon domicile au bureau à vélo – avec assistance électrique car il vente à Nantes ! De même, je n’aurais pas non plus pensé à acheter d’occasion plutôt que neuf, à offrir des activités plutôt que des objets.
La prise de conscience a évolué rapidement ces dernières années, avec le niveau de transparence demandé par les citoyens. Mesurer, connaître, chercher et informer sont essentiels. Attention aux fausses informations et aux messages émotionnels plutôt que scientifiques, qui sont faciles à trouver entre le « greenwashing » (procédé de marketing visant une image de responsabilité écologique, trompeuse) et les réseaux sociaux. Je me laisse parfois piéger à force de me mettre trop de pression. L’idéal est d’être dans l’écologie plaisir, en étant conscient de ses impacts, mais aussi indulgent avec soi-même et les autres.


Olivier Renaud © DR

Olivier Renaud, ex-volontaire, analyste financier

Olivier a 26 ans. Il est parti deux ans au Sénégal pour travailler dans le cadre d’un volontariat international en entreprise.

Un nombre croissant de jeunes souhaite s’engager dans des activités cohérentes avec leurs valeurs. Lorsque l’on cherche un travail, la difficulté est de trouver l’opportunité qui concilie un nombre important de contraintes. Ai-je les compétences ? Quels seront mes tâches, mon salaire, l’ambiance ? En ajoutant l’idée de sens, la tâche devient encore plus délicate.
J’ai eu la chance de vivre en Afrique pour cette mission de volontaire pendant deux ans. Je travaillais dans une société qui développe des infrastructures de grande ampleur sur ce continent, et plus particulièrement au Sénégal. Ses projets consistent à développer et gérer des centrales solaires mais aussi des infrastructures dans la mobilité. L’absence de réseaux routiers décents empêche les populations enclavées les plus défavorisées de rejoindre les villes pour aller à l’université et trouver un emploi.
Il est deux fois plus coûteux d’acheminer un conteneur d’Ouagadougou à Abidjan que de Shanghaï à Abidjan sur un parcours seize fois plus court. Développer les infrastructures pour mettre fin à ces anomalies permettra de soutenir l’industrie entre les deux villes, de créer de l’emploi, et aussi de réduire l’impact environnemental. Les centrales solaires, que ma société a développées et gère, fournissent une électricité moins chère et plus propre à presque 5 % de la population sénégalaise, soit 750 000 personnes. L’impact est concret ! Et cet impact concret et positif était le sens de mon travail.
Dans le monde du travail, il est difficile de trouver les opportunités qui « cochent toutes les cases ». C’est aux jeunes de mettre la pression aux recruteurs sur le besoin qu’ils ont de mettre du sens dans leur engagement. À court terme, cette recherche de sens peut être un frein pour trouver un emploi, mais sur le long terme la satisfaction de s’accomplir par son travail – et son engagement – n’en sera que plus forte.

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