Du papier à l’écran !

© Élisabeth Renaud

En analysant l’évolution de la presse sur les trente dernières années, nous essayons de comprendre comment certains titres, comme le PO sont devenus des « pure players » (tout numérique).

La presse écrite en France reste tout à fait majoritaire. Parmi les chiffres clés : 97,1% de la population française déclare lire la presse chaque mois, quels que soient les supports de lecture, soit 50,9 millions de lecteurs ; le mobile est installé comme deuxième support de lecture derrière le « print » (support imprimé). La presse déclare en 2018, 3,2 milliards d’exemplaires vendus dont 8% en version numérique. Mais le « print » diminue de 3% par an alors que le numérique augmente de 42%. La fréquentation des sites de presse représente 17 milliards de visites dont 58% sur smartphones et tablettes (mobilité). Mais les fréquentations augmentent de 11% par an (30% sur les mobilités). On mesure donc le grand succès des supports numériques.

 

Une information courte

On peut penser que quatre grandes familles de facteurs peuvent expliquer cette tendance. L’évolution des technologies a permis de mettre l’ordinateur, puis les tablettes et smartphones entre les mains du plus grand nombre. Ensuite, le comportement des lecteurs de la presse a changé en particulier chez les jeunes. On est passé d’une communication verticale (la presse offre un certain nombre d’articles par rubrique périodiquement et le lecteur est bien obligé de prendre) à une offre horizontale : à partir d’un mot clé, le lecteur choisit l’information dont il a besoin et navigue de site en site. Par ailleurs, le lecteur cherche une information courte et rapide à lire. Le troisième facteur concerne la logique de coût qui a favorisé aussi cette évolution. D’abord parce qu’assez rapidement les annonceurs se sont tournés vers les supports numériques et la presse écrite s’est trouvée privée d’une partie de ses ressources. Et enfin, les réseaux sociaux ont guidé l’offre d’information sur les supports numériques plus proches des acteurs de ces réseaux.

Et gratuite

La presse écrite reste très vivante sur des créneaux particuliers grâce à la segmentation du marché de l’information et l’augmentation de la productivité au niveau de l’impression. Les plus âgés d’entre nous accepteront peut-être de payer leur journal papier plus cher quand les plus jeunes réclameront une information gratuite. Le débat ne se situe plus à ce niveau. Il se situe au niveau de la qualité de l’information. Il s’avère que presse écrite et presse numérique ont besoin l’une de l’autre. Mais le « trolling » (manipulation des lecteurs) sur les réseaux sociaux (plus une information est « likée » (aimée) et partagée, plus elle a des chances d’être vraie) et la recherche du scoop conduisant les journalistes et les directeurs de rédaction à être moins regardant sur la vérification des nouvelles, laissent la place aux « fake news » (fausses informations). Le problème est donc l’opposition entre information de qualité et information douteuse voire erronée. Les rubriques « le vrai du faux » ou « La brigade de vérification des infox » (fausses informations) de nos journaux en témoignent. C’est aussi un enjeu dans la formation des jeunes générations.

Stéphane Griffiths

L’effet de pile

« Lorsque j’étais directeur du Monde, je demandais tous les mois à mes équipes commerciales pourquoi les gens se désabonnaient. La raison principale, c’était l’effet de pile : le journal s’empilait sur la table de la salle à manger et les lecteurs abonnés disaient ‘j’attends le week-end’, puis ‘j’attends les vacances’, puis tout ça partait à la poubelle. » Éric Fottorino, ancien directeur du Monde.

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