DVD
Un film d’Yvan Attal (d’après le roman de Karine Tuil). Sortie DVD : avril 2022, Gaumont.
Cela commence avec un contexte compliqué, enfin, avec des histoires d’aujourd’hui : couples séparés et recomposés, professionnels parisiens en vue dans les médias et la culture, enfants navigants, mœurs libres… sauf dans une famille juive pratiquante.
Cela continue avec un « événement » que personne n’a vu venir et qu’on ne verra pas. Et un coup de tonnerre : le dépôt de plainte d’une jeune fille (de la famille israélite traditionnelle) contre un étudiant (issu des « people » médiatiques) qu’elle ne connaissait pas la veille et qu’elle accuse de viol. L’un, Alexandre, est le fils de la nouvelle compagne du père de l’autre, Mila.
Le film permet à Alexandre, jeune homme brillant déjà expérimenté, puis à Mila, plus incertaine, tiraillée entre deux mondes – tous deux également sympathiques –, de s’exprimer séparément sur ce qui s’est passé. Puis nous sommes renvoyés presque 3 ans plus tard, au moment du procès.
Les deux protagonistes apparaissent alors dans des nuances qui éclairent – ou assombrissent – leurs personnages. Chacun va devoir raconter non seulement la soirée qui a mal tourné, mais sa sexualité, son passé relationnel ou amoureux, chacun confronté à ses incohérences et ses peurs. Des peurs, des hontes et un souci de « réputation » qui reflètent étonnamment le monde des parents, les libertaires comme les pratiquants.
On a l’impression de s’approcher peu à peu de « la vérité », mais non, on ne saura pas. On ne saura pas plus que ce que les pratiques intimes, les mots échangés peuvent suggérer de décalages humains, de vulgarité reproduite, de machisme inconscient, d’apparences d’acquiescements…
Alors, s’agit-il d’un viol ? Aussi attristantes qu’elles soient, les modalités de cette relation éphémère entre deux jeunes adultes (d’autres cas auraient été jugés bien différemment) ne permettent pas de trancher définitivement. Elles interrogent en revanche sur les notions de « consentement » et de « normalité », dans une culture contradictoire, la nôtre, où liberté rime rarement avec égalité ; où la facilité des aventures d’un soir ne concorde pas toujours avec le respect de l’autre ; où il apparaît que les codes de la rencontre eux-mêmes ne sont pas partagés par tous et toutes.
Séverine Daudé