Par Anne-Marie Balenbois, Paroles protestantes Paris
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À la fin du XVIe siècle, les 17 provinces des Pays-Bas sont en ébullition. Le très catholique roi d’Espagne Philippe II devient le suzerain de ces territoires au moment où une grande partie des habitants se convertissent à la Réforme. Une rébellion déclenche une guerre entre le roi et une partie des provinces qui veulent défendre leur autonomie et la liberté de culte. Né en 1558 dans le sud des provinces, à Tournai, Isaac Le Maire est protestant. Il est contraint de fuir sa ville natale en 1581 après sa prise par les troupes catholiques. Il s’installe à Anvers et développe une activité commerciale jusqu’au terrible sac qui ruine la cité en 1585 sur l’ordre des Espagnols. Les provinces du Nord, majoritairement protestantes, font sécession. C’est à Amsterdam que s’installe Le Maire, qui recommence à nouveau sa vie dans une ville à l’écart du théâtre des opérations et où il peut pratiquer sa religion en paix.
Naissance de la Compagnie des Indes
Isaac Le Maire est un homme intelligent, entreprenant et très dynamique. Négociant en produits alimentaires, il poursuit cette activité au niveau européen en créant avec des associés une compagnie qui commerce avec la Russie, l’Espagne et des villes italiennes. Il comprend dès le premier voyage d’un Hollandais aux Indes quels profits sont possibles avec les destinations plus lointaines. Les bénéfices sont considérables (jusqu’à 400 %) quand les bateaux reviennent au port, grâce notamment aux épices. En 1602, les compagnies existantes fusionnent pour créer la Compagnie hollandaise des Indes orientales (VOC), dont Isaac Le Maire est le plus important actionnaire puis le gouverneur.
En 1602, un désaccord financier l’oppose à la VOC concernant les calculs d’un voyage. Il est accusé de truquer les chiffres. Le conflit s’envenime et même le consistoire s’en mêle. Le Maire est contraint de payer une amende de 7 200 florins pour éviter un procès. Exclu de la VOC à son vif mécontentement, il n’accepte pas d’être limité dans ses affaires. Il négocie auprès des États de Hollande le droit de faire quatre voyages vers les Moluques, dans le Pacifique.
Découverte du cap Horn
Une expédition de deux navires est montée avec l’aide financière de la ville zélandaise de Hoorn. Un des fils d’Isaac, Jacob (on reste dans la Genèse…), prend le commandement d’un bateau. Isaac se refuse à passer par les routes officielles du cap de Bonne-Espérance ou du détroit de Magellan, soumises à des droits de passage élevés par la VOC. Le 29 janvier 1616, après être descendue très au sud, l’expédition trouve une autre voie, par un détroit que Jacob nomme détroit de Le Maire en l’honneur de son père, puis reconnaît le cap Hoorn, qui perdra une lettre au fil du temps.
L’expédition se termine mal. En arrivant à Java, Jacob Le Maire est arrêté par des agents de la VOC qui ne croient pas à la découverte de ce nouveau cap ; il mourra à 31 ans dans le voyage du retour à Amsterdam. Isaac portera plainte contre la Compagnie et obtiendra réparation après trois ans de procès : le bateau est remplacé et le cap Horn est reconnu officiellement.
Particulièrement difficile à doubler d’ouest en est en raison du vent de face dominant, il n’est plus guère emprunté de nos jours que par des pétroliers trop gros pour le canal de Panama, par des bateaux de pêche locaux et bien sûr par les voiliers des courses au large qui rappellent l’héroïsme des découvreurs dont les bateaux remontaient très difficilement au vent.