Pas de vagues

Un film de Teddy Lussi-Modeste, avec François Civil, Shaïn Boumedine, Bakary Kebe, 92 min, thriller social.

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Par Philippe Arnaud

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Une nouvelle génération de films « en milieu scolaire » voit le jour depuis quelques semaines.

 

La précédente (Les Héritiers, La Vie scolaire…) gardait un optimisme volontariste sur la capacité des enseignants et personnels d’éducation à faire grandir les ados. La Salle des profs (Das Lehrerzimmer) de Ilker Catak, sorti en 2023 en Allemagne, Pas de vagues, ou Amal en Belgique en prennent le contrepied : à société malade, école malade. Dans le premier, une enseignante qui a voulu découvrir qui commettait des vols en salle des profs se trouve mise au ban de son établissement ; dans le second, inspiré du vécu du réalisateur, un jeune enseignant, accusé à tort de harcèlement sur une élève, vit un chemin de croix similaire. Leur administration ne les soutient pas ; les collègues se désolidarisent et les mettent en accusation ; les parents leur tombent dessus ; les élèves mettent en place des mécanismes de diffamation et de discrédit de l’enseignant via les réseaux sociaux et la rumeur.

 

Interpeller le spectateur

 

Écrits et montés comme des thrillers qui clouent le spectateur au fauteuil, crédibles et réalistes, ces films décrivent un milieu impitoyable, oppressant, hyper-individualiste. Carla et Julien, professeurs bienveillants, attentifs aux élèves, motivés, commettent à l’origine une erreur : elle filme le voleur à son insu, il invite certains élèves au kebab. Dès lors, ces deux films décrivent un engrenage implacable, qui fait d’eux des boucs émissaires. Leur déchéance met au jour les lâchetés, mesquineries, jalousies de ceux qui les entourent.

 

Pas de vagues est un peu moins abouti que son cousin d’outre-Rhin, trop centré dans sa mise en scène sur Julien, son amertume, sa colère de voir son homosexualité mise sur la place publique ; on sent parfois à travers lui celles du réalisateur qui règle ses comptes. L’interprétation impeccable de François Civil donne cependant une cohérence à ce choix.

 

La fin abrupte des deux films laisse le spectateur perplexe, comme pour l’interpeller, à la croisée des chemins : au-delà de l’école, comment faire société, aujourd’hui ? Carla, elle, tient le cap, garde ses valeurs, contre vents et marées. Un exemple à méditer.

 

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