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L’espérance réclame du courage
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La notion de courage est nécessaire pour comprendre le sens de notre foi profonde*.
À ceux qui sont aux prises avec des difficultés et des peines, je dis souvent « bon courage ». J’entends ainsi leur adresser une parole positive (pas négative comme « je vous plains » ou « mon pauvre ami »). J’ai conscience d’employer une formule convenue ; elle n’en est pas moins sincère et exprime une foi. Elle a l’inconvénient d’être vague : en quoi consiste ce courage que je souhaite à mon interlocuteur ? Avoir du courage veut dire faire face aux situations qui se présentent. Lesquelles et comment ?
Faire face à quoi ?
Nous sommes sensibles au dramatique et au périlleux, et oublions le banal et l’ordinaire. On ne parle pas très souvent du courage de la vie quotidienne, tellement il paraît aller de soi. Pourtant il est important. Chaque jour, nous nous adonnons à des occupations nécessaires, répétitives, parfois usantes : se lever, nettoyer son domicile, mettre de l’ordre, entretenir son ménage, etc. Ces tâches impliquent un effort : celui de surmonter fatigue, lassitude, négligence et paresse. Ne pas se laisser aller demande du courage, un courage discret, modeste, peu mis en valeur mais qui mérite cependant d’être signalé.
Ce courage de l’ordinaire exprime un espoir : que tout cela vaut la peine d’être fait et d’être bien fait. La vie peut se montrer douce ou cruelle, tranquille ou agitée, heureuse ou malheureuse ; en tout cas, elle n’est ni vaine ni absurde. Elle a du sens. Ce sens ne se révèle pas et ne s’honore pas seulement ni même principalement dans des circonstances exceptionnelles ; il réside aussi et surtout dans ce qu’on considère à tort comme de petites choses (« qui est fidèle dans les petites choses l’est aussi dans les importantes » dit l’Evangile). Ce courage surmonte ce que les anciens appelaient l’acedia, le sentiment que « tout est vanité », la perte du goût de vivre, l’ennui d’avoir à agir. Thomas d’Aquin a rangé l’acedia dans la liste des péchés capitaux ; par péché, n’entendons pas une faute morale, mais ce que la foi contredit et combat : elle lutte contre le mal-être qui nous guette et elle suscite le courage du quotidien.
À côté du banal, nous affrontons parfois des moments terribles où notre vie se joue et où des désastres nous menacent (le psaume 23 parle de la « vallée de l’ombre de la mort »). Le courage n’a pas alors à surmonter la lassitude, comme dans le cas précédent, mais la peur. Dans l’Ancien Testament, le mot « courage » apparaît en général dans le contexte de guerres et de batailles, où Israël se trouve en position d’infériorité. Il est un peuple faible ; il craint les armées ennemies. Il doute de ses forces et il cherche du courage dans la confiance en Dieu qui se tient à ses côtés. Comme le dit Josué au peuple qui, après la mort de Moïse, va devoir entrer en Canaan, un pays aux capacités militaires redoutables : « Fortifie-toi et prends courage. Ne t’effraie pas et ne t’épouvante pas car l’Éternel ton Dieu est avec toi partout où tu iras » (Jos 1.9). Dans les Évangiles, ce sont des gens aux prises avec des infirmités physiques lourdement invalidantes, des paralytiques et des aveugles, qui sont invités à prendre courage, autrement dit à faire confiance à Jésus (Mt 9.2 ; Mc 10.49). Et quand le navire où il s’est embarqué va faire naufrage, Paul exhorte ses passagers au courage (Ac 27.22).
Entre le quotidien et les grandes détresses, de nombreuses situations demandent du courage. Sans chercher à en dresser une liste complète, mentionnons la peur de l’inconnu ; il faut du courage pour s’ouvrir à l’autre (ainsi pour accueillir et ne pas repousser l’étranger), au différent (pour sortir de ses routines et innover). Il faut du courage pour avoir des enfants dans un monde angoissant à l’avenir sombre et incertain. Il faut du courage pour prendre des décisions dans des situations où on n’y voit pas clair.
Faire face comment ?
Comment fait-on face? Le courage me semble se composer de trois éléments, le troisième étant le plus important du point de vue de la foi.
André GOUNELLE, professeur de théologie systématique émérite
à la faculté de théologie protestante de Montpellier
* Article paru dans Ressources n° 12, oct. 2020. Disponible aux éditions Olivétan.